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Cancer et couple : comment ne pas devenir “juste soignant / soignante” pour l’autre ?

Dernière mise à jour : 22 mai

Quand le cancer s’invite dans un couple, elle ne touche pas qu’un seul corps. Elle bouleverse les rôles, les repères, la dynamique émotionnelle, et souvent… l’intimité.

Peu à peu, le partenaire en bonne santé devient celui ou celle qui soutient, qui gère, qui accompagne. On se mobilise avec amour, avec courage. Mais parfois, sans même s’en apercevoir, on glisse dans un rôle de “soignant·e”. Et on s’éloigne doucement de celui ou celle qu’on était : un·e partenaire, un·e amoureux·se, un·e amant·e.

Cette transformation peut créer une grande solitude, de la confusion, voire un éloignement affectif et sexuel. Pourtant, il est possible de prendre conscience de ce glissement et de retrouver un lien plus équilibré. Je vous en parle ici.


photo en noir et blanc d'un couple enlacé de dos avec une citation de Marcelle Sauvageot qui dit “je voudrais le retrouver quand je reviendrai guérie.  La certitude que quelqu'un continue à aimer et à attendre, pour qui le reste n'est qu'un dérivatif momentané et sans pouvoir, est un grand bonheur pour un malade”.
citation de Marcelle Sauvageot


Quand le rôle de partenaire devient celui d’aidant durant le cancer

Dans un parcours de cancer, il est naturel de vouloir aider, soutenir, être présent·e. On prend le relais sur la gestion des enfants, on prends des rendez-vous, on prépare les médicaments, on rassure, on accompagne dans les effets secondaires, les peurs, la fatigue, etc...

Mais cette implication totale peut finir par faire disparaître la place du couple. Le quotidien se transforme en gestion de crise, et les échanges se centrent uniquement sur la maladie.

Ce que l’on exprime rarement, c’est la charge émotionnelle que cela représente pour celui ou celle qui aide :

  • la peur de ne pas bien faire,

  • la peur de perdre l'autre,

  • l’épuisement silencieux,

  • et parfois, la sensation de ne plus “exister” en tant que personne désirée ou désirable.

« Je ne savais plus si j’étais sa compagne ou son infirmière. »Ce type de témoignage revient souvent dans mes consultations.

Les conséquences sur la relation

Quand l’un devient aidant·e, le lien amoureux peut s’effacer doucement, sans qu’on s’en rende compte.

  • La communication émotionnelle devient fonctionnelle : on parle organisation, traitements, symptômes.

  • Le désir peut se figer : le regard porté sur l’autre change, parfois inconsciemment.

  • La sexualité s’éloigne, et avec elle la complicité physique.

  • La culpabilité s’installe : → « J’aimerais retrouver du désir mais je n’y arrive pas. » « Je culpabilise de vouloir qu’on se touche alors qu’il/elle est malade. »

Dans beaucoup de couples, cette distance n’est jamais nommée. Et le silence creuse le fossé.


Comment préserver — ou reconstruire — le lien ?

La première étape est de prendre conscience de ce glissement. De reconnaître qu’il est normal, mais qu’il n’est pas une fatalité.

Voici quelques pistes que je travaille souvent en accompagnement :

1. Mettre des mots sur ce qui se vit

Parler de la peur, de la fatigue, du manque de contact. Sans accusation. Simplement pour que chacun retrouve une place humaine dans la relation.

2. Réinventer l’intimité

L’intimité ne se limite pas à la sexualité. Elle peut passer par une main posée sur l’épaule, un regard tendre, un moment à deux sans parler de la maladie. Ce sont souvent ces petits gestes qui permettent de se reconnecter en douceur.

3. S’autoriser à être vulnérable

Il n’est pas nécessaire d’être “fort·e” tout le temps. Laisser place aux émotions, même contradictoires, est un acte d’amour.

4. Se faire accompagner

Parfois, un espace neutre et confidentiel permet d’ouvrir des dialogues difficiles. Un accompagnement thérapeutique peut aider à redéfinir les rôles, à restaurer la communication, à retisser une forme d’intimité nouvelle.


Conclusion

Le cancer bouleverse les corps, les cœurs et les liens. Mais il peut aussi devenir un moment de transformation du couple. Un chemin vers plus de conscience, de délicatesse, d’écoute mutuelle.

Ne pas devenir juste soignant·e, c’est préserver la relation dans sa dimension humaine, sensible, amoureuse. C’est redonner de la place à l’amour, à l’intimité, même dans la tempête.

Et ce chemin, vous n’avez pas à le parcourir seul·e.




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